Parce que mieux vaut se faire une idée par soi-même.
On notera simplement que certains des propos de Tariq Ramadan ont été depuis démentis, en particulier ceux qui consistent à affirmer que Caroline Fourest tronque les citations de Ramadan pour en modifier le propos. Dans son propre blog, elle reprend les citations in extenso pour prouver que c’est faux, et que si on n’a pas chez lui d’homophobie appelant au meurtre des gays, il y a néanmoins là un discours qui consiste à dire que les homosexuels constituent une orientation néfaste, qu’il s’agit de remettre dans le droit chemin. Plus de détails là : http://carolinefourest.wordpress.com/2009/09/28/tariq-ramadan-deforme-ses-propres-citations/ On lira aussi, avec intérêt cet autre article : http://carolinefourest.wordpress.com/2009/09/27/le-dernier-show-de-tariq-ramadan-chez-ruquier/
Bon, ne nous énervons cependant pas plus qu’à l’habitude : le pape prononce à peu près le même discours, et on s’y est finalement très bien fait. Mais, bien sûr, entre un huluberlu en robe et un professeur d’islamologie, plutôt du genre médiatique (on apprécie, hein, le personnage un peu introverti, genre « j’ai une vie intérieure intense, mais je me force à aller dans les media, sur lesquels je porte néanmoins un regard distancié, un peu en plongée; j’accepte le dialogue, mais je sais mettre mes interlocuteurs sur un terrain qu’ils ne maîtrisent pas, bref, je marque en permanence notre inégalité, tout en restant d’un calme olympien; j’ai du reste tous les attributs du sage (seuls les malins savent que c’est là le signe qui ne trompe pas, et qui désigne ceux qui ne le sont pas, mais bon, on passe à la télé, alors les malins, il y a peu de chances qu’ils regardent… les autres, en revanche…)), la portée des discours n’est pas la même. Elle n’est particulièrement pas la même quand, dans les quartiers où l’islam est le plus présent, chacun doit se conformer à des règles qui ne sont, en France, inscrites nulle part, forgeant les esprits à accepter ou refuser autrui selon des normes qui ne sont, tout simplement, pas celle de ce pays. Là aussi, comme le pape, mais en plus efficace, Ramadan mesure mal la portée de ses propos. A moins que, justement, il la mesure tout à fait précisément.
On ajoutera un dernier élément, plein d’espoir.
Le marché, on le sait, suscite tout, provoque tout, et absorbe tout.
Ainsi, en page d’accueil du site perso de Tariq Ramadan, trône une pub pour son nouveau livre : Mon intime conviction.
Le détail amusant, c’est la mention qui se trouve juste après l’annonce de la sortie du livre : « Le livre sera disponible officiellement le 29 Septembre et exceptionnellement en vente dans les librairies musulmanes pendant le mois de Ramadan ».
Joli timing. Et une preuve supplémentaire que s’il y a bien un outil d’intégration qui fonctionne à tous les coups, sans exception, à ma connaissance, c’est bien la marchandisation. Nous voyons le ramadan devenir peu à peu une fête commerciale, rentable, une marchandise comme les autres. La vente de livres au bon moment fait partie du kit commercial de ce marché de niche. Comme Noël. Comme Halloween.
Et c’est peut être le meilleur moyen de comprendre l’ambiguïté de Tariq Ramadan.
Me retrouver dans le même camp que cette pouffe de Caroline Fourest (j’emploie le mote de pouffe de façon délibérée, c’est une rareté chez moi, on voudra bien donc ne pas y voir un symptôme de misogynie, ni d’anti-féminisme : le terme de chat étant supposé recouvrir le concept de l’animal éponyme, celui de fripon étant dévolu à Rollet, il ne reste vraiment que celui de pouffe pour Fourest), a de quoi gâcher ma fin de semaine. Même intelligent, même propre sur lui, même pixelisé, même (surtout !) Sarkozy compatible, Tariq Ramadan n’en reste pas moins le propagateur d’une religion rétrograde, sexiste, homophobe, obscurantiste, d’une religion quoi !
Car on pourrait évidemment, sans chercher très loin ni sans forcer le trait, trouver les mêmes « qualités » (oui Lulu, des qualités comme celles de « L’homme sans qualités ») chez ses confrères catholiques, protestants de tous poils, juifs, rahéliens, adorateurs du feu ou scientologues ! J’oubliais les animistes et puis aussi certains excités de « La libre pensée » dans sa version archéo-lambertiste.
En résumé, et quelles que soient leurs formes d’apparition plus ou moins modernes, depuis des siècles et des siècles, les seuls arguments utilisables dans une discussion avec ces vermines sont : « Ecrasez l’infâme » et « Le cléricalisme voilà l’ennemi ». Et puis après tout, puisque, avec nos mains calleuses, nous nous sommes risqués ici chez les intellectuels, il croit bien nous souvenir d’un : « L’homme est appauvri de ce dont Dieu est enrichi ».
Mince :
j’ai cité Fourest sans bien réaliser de qui il s’agissait. En fait, je l’avais déjà vue plusieurs fois intervenant dans des émissions, et je l’avais trouvée, hmmmm… trop énervée pour ne pas être énervante, et tapant un peu systématiquement à côté de quoi que ce soit qui pourrait ressembler à un quelconque véritable argument. Mais je n’avais pas retenu son nom. Du coup, je ne réalisais pas que c’était d’elle que je parlais ! Du coup, me voici maintenant un peu surpris, à mon tour, d’avoir partagé pour quelques lignes ses arguments. Enfin bon, en même temps, à un moment donné, il faudra bien comprendre qu’il n’y a pas de combat qui puisse se gagner sans batailler aux côtés d’autres compagnons qui peuvent déplaire. Une opposition qui ne pige pas ça n’a d’opposition que le nom.
Quant aux religions, je ne suis pas absolument certain qu’on puisse mettre tout le monde dans le même panier, et je ne suis pas convaincu par l’affirmation selon laquelle toutes les religions se vaudraient, ne serait ce que parce qu’il me semble qu’il y a tout de même une partie de nos valeurs, y compris laïques, qui nous viennent bel et bien du christianisme (pas ce qu’en fait B16, mais ce qui peut en constituer le propos essentiel : aimer dieu, c’est aimer les hommes, chercher dieu, c’est être attentif aux hommes, et à ce qu’il y a de grand en eux, chacun d’eux, y compris les non chrétiens. A ma connaissance, aucune autre religion n’est aussi proche de n’être plus une religion, mais quelque chose de plus universel encore. Et sans doute faut il, d’après moi, y reflechir à deux fois avant de larguer en plein vol cet part de ce qui demeure, tout de même, nos racines, y compris quand on pense notre culture comme laïque. Enfin, il serait temps, à ce que je vois au boulot, et à voir comment ça évolue, qu’on sache mettre un peu plus en avant une laïcité qui soit autre chose qu’un simple pluralisme dans lequel la voix la plus radicale est la seule qui se fasse entendre.
S’il n’y en avait au bas mot trois millions d’autres, Caroline Fourest constituerait à elle seule une excellente raison de ne pas se commettre à lire l’organe officiel des abjections verte modem réunies, j’ai nommé Charlie hebdo.
Aimer Dieu, c’est aimer les hommes ! T’es bourré ou quoi ? Comme si l’église catholique par exemple avait jamais donné l’exemple de la tolérance. Tuez les tous, Dieu reconnaîtra les siens. Pie XII et son soutien aux nazis. Benoit XVI qui condamne la capote. Merci, ça va, je n’ai pas besoin de leur amour !
Quant à la laïcité, elle n’a rien à voir avec le pluralisme : elle affirme tout simplement que les croyances religieuses sont de la sphère privée et qu’elles ne doivent pas en sortir. En particulier à l’école. L’éducation est obligatoire, pas l’école : ceux qui ne sont pas prêts à respecter cette laïcité n’ont rien à y faire. C’est à double titre un motif d’exclusion : de l’école d’une part et de l’intégration dans la société d’autre part ? Oui, c’est vrai. C’est aussi pour lutter contre ça que sont faits les services sociaux : donner aux jeunes les moyens de leur liberté de conscience quand la famille les opprime ou les maltraite. Ce n’est pas facile ? Bien sûr et c’est pour ça que l’angélisme du jkrsb (que j’ai connu plus pêchu) me surprend et m’irrite.
Je ne crois être ni angélique, ni naïf : l’auréole que je porte n’est que mon treillis camouflage !
D’abord, je ne pense pas qu’on puisse mettre toutes les religions à égalité de méfiance. Ensuite, je ne pense pas que le pape soit chrétien, et je ne suis pas certain que le christianisme relève vraiment de ce qu’on appelle communément « religion ».
Mais surtout, c’est bien, de penser un monde dans lequel tout le monde se serait libéré de l’obligation d’avoir un dieu. Fort bien. Mais qu’on le veuille ou non, éducation ou pas, nous ne sommes pas dans ce monde. Et quelle que soit la définition de la laïcité qu’on utilise, la religion, pour le religieux, n’est pas qu’une affaire privée. On peut expulser tous ceux qui ne parviennent pas à ranger leur dieu dans leur « chez soi », mais je crains qu’au bout du compte, il reste peu de monde. Cela dit, je crois que j’oeuvre quotidiennement pour cette émancipation. Mais, si je le fais de la hauteur de mon athéïsme, avec pour objectif d’y faire adopter mes fidèles, alors il ne s’agira pas d’émancipation, mais d’une nouvelle aliénation, rien de plus. Et si je partais sabre au clair, en voulant pourfendre du fidèle, je ne gagnerais ni en honnêteté, ni en efficacité.
En fait, évidemment, on se porte mieux dans une société dans laquelle les préceptes religieux ne dictent pas les lois, les moeurs et les amitiés. Mais pour autant, il me semble qu’il y a chez quelques religieux une richesse qu’on perdrait si on l’interdisait. Enfin, pour ma part, je ne suis absolument pas certain qu’il n’y ait rien de plus que ce qu’il semble y avoir. Je sais bien que s’il y a quoi que ce soit d’autre, les religions telles que je les vois en sont l’expression la plus ridicule. Mais je ne peux que difficilement eliminer physiquement ceux qui se reclament de ce regard naïf là.
Quant à voir en l’homme un dieu, franchement, c’est régulièrement la seule chose qui m’empeche, sinon de tuer, du moins de frapper.
C’est un peu long (chez jkrsb, ce n’est pas vraiment un problème…) et ça vient du Figaro (jkrsb est oecuménique), mais c’est intéressant :
« Le dimanche 4 octobre dernier, l’équipe de football du Paris Foot Gay (PFG) doit se déplacer chez son adversaire du jour, Créteil Bébel. Une rencontre de coupe organisée par la Commission Football Loisirs (CFL), un organisme sportif qui n’a toutefois aucun lien avec la Fédération française de football. Mais, la veille du match, les dirigeants du club parisien reçoivent ce mail de leurs adversaires, un message retranscrit sur le site Internet du Paris Foot Gay : «Désolé mais par rapport au nom de votre équipe et conformément aux principes de notre équipe, qui est une équipe de musulmans pratiquants, nous ne pouvons jouer contre vous, nos convictions sont de loin plus importantes qu’un simple match de foot, encore une fois excusez-nous de vous avoir prévenu si tard».
«C’est surréaliste», réagit Pascal Brèthes, le président de l’association Paris Foot Gay, qui explique que son équipe, à l’exception de quelques insultes, n’a jamais été confrontée à une telle situation. «Est-ce que nous déciderions de la même manière de ne pas jouer contre une équipe de juifs, de musulmans, de noirs ?», s’interroge-t-il, tout en rappelant que la CFL, organisatrice de l’événement, est elle-même signataire d’une charte contre l’homophobie. Pascal Brèthes veut voir dans l’attitude du club cristolien un acte d’«homophobie ordinaire», comme le football en est, selon lui, coutumier.
Pour le président de la CFL, Jacques Stouvenel, la situation n’est «pas acceptable». «Le football n’a ni couleur, ni religion», juge-t-il. Sans préjuger de la future décision du comité directeur de son association, qui se réunit le 13 octobre pour décider de l’attitude à adopter face à ce «cas exceptionnel», il évoque une possible exclusion de l’équipe de Créteil. Une nouvelle équipe qui vient de rejoindre la CFL. «Il y a quelques années, des insultes proférées à l’encontre de joueurs juifs par des supporters d’une autre équipe avait provoqué l’exclusion de cette dernière», explique-t-il. «On va écouter les dirigeants de Créteil Bébel, prévient Jacques Stouvenel, mais je pense que ce qu’ils ont fait est très grave et qu’ils en sont d’ailleurs conscients».
«On n’est pas homophobes»
Rien n’est moins sur car, côté cristolien, le président Zahir Belgharbi défend une décision qu’il a prise seul, et qui, reconnaît-il, suscite le débat dans son équipe. «On n’est pas homophobes. Chacun vit sa sexualité, sa religion …, comme il l’entend. Mais nous ne soutenons simplement pas la cause du PFG», explique-t-il au figaro.fr. «Je refuse que des considérations politiques pénètrent sur le terrain». «J’aurais très bien pu invoquer un manque de licences valides, ce qui était d’ailleurs le cas, mais j’ai préféré être franc», ajoute-t-il. Interrogé sur la possible exclusion de son équipe – déjà écartée l’an dernier d’une autre fédération sportive – par la CFL, Zahir Belgharbi ne bronche pas : «On acceptera cette décision. Mais c’est selon moi une manière pour la CFL d’exister». Plus généralement, Zahir Belgharbi craint que cette affaire ne soit une nouvelle occasion de stigmatiser la population musulmane. «Nous avons nos convictions (sur l’homosexualité, ndlr), n’a-t-on pas le droit de les affirmer ? Citant les débats récurrents sur le voile islamique, la construction de mosquées, il conclut : «Je constate souvent que nous ne sommes pas dans la même catégorie de Français, nous n’avons pas les mêmes droits».
Le président du PFG, un club qui rassemble des joueurs homosexuels comme hétérosexuels et mène des actions avec la Licra contre les discriminations de tous ordres, n’entend pas en rester là. Comme l’explique France Bleu 107.1 (Ile-de-France), qui a révélé l’information, il entend porter l’affaire en justice. Au-délà de l’éventuelle sanction sportive du club cristolien, Pascal Brèthes souhaite aussi être reçu par la secrétaire d’État aux Sports Rama Yade, une demande qui n’a pu aboutir sous l’ère Laporte, pour évoquer les problèmes de discrimination dans le sport. Paris Foot Gay souhaiterait la mise en place de modules de formation sur la discrimination à destination des éducateurs sportifs. Il entend également sensibiliser la Fédération française de football et la Ligue de football professionnel. Sollicité, le secrétariat d’État aux Sports n’avait pas encore réagi au moment de la mise en ligne de cet article. »
J’avais eu l’info aujourd’hui, via des collegues qui me l’avaient refilée. Comme on dit : « nous y voila ». Mais bon, à vrai dire, c’est pas une nouveauté, c’est quelque chose qui est vécu au quotidien par tous ceux qui, dans les familles musulmanes ou plus largement dans les « quartiers », ont la malchance d’être gay. Quotidiennement, quasiment chaque heure de cours, je suis confronté à la haine des femmes, à la haine des homosexuels, à une représentation systématiquement dévalorisante des autres religions et de la laïcité. Et quotidiennement, il faut se battre pour remettre les idées à l’endroit, à raison de deux heures par semaine, alors que tout ce petit monde se monte la tête quasiment 24h/24. Pire : les filles, sur lesquelles on pouvait jusque là s’appuyer, nous échappent ces derniers temps.
Et à titre personnel, si on a déménagé deux fois en un an, c’est bien parce que notre expérience de mixité sociale a échoué sur les insultes, les menaces et les promesses d’aggression future. Bilan, nous voici dans une banlieue bourgeoise, au loin, à se dire que le fric, ca sert entre autres à mettre les autres à distance.
Je me dis que, certes, les autres religions ne nous portent pas non plus en odeur de sainteté. Mais il me semble qu’au moins actuellement, nous avons un problème spécifique avec l’islam. Et je ne sais pas dans quelle mesure ce n’est pas un problème plus essentiel, plus profond. Du moins, il ne me semble pas qu’une equipe de foot catho (ca existe, ça ?) pourrait oser ça aujourd’hui.
Je sais bien que je prete le flanc à pas mal de baffes en écrivant ça, mais je suis assez convaincu que dans la guerre que se livrent les religions, on s’éviterait un certain nombre de problèmes en ne reniant pas totalement notre héritage chrétien. Mais c’est pure tactique. Et sur le fonds, je suis d’accord avec toi.
A la reflexion (mais j’ai facilement l’esprit d’escalier), je sais pourquoi je te semble un peu mou du genou. C’est juste que par hasard, j’ai repris la lecture du dernier journal de Dantec, que j’avais laissé en suspens. Et bon, je crois que lire ça, étant donné ce que je vois quotidiennement, c’est une sorte de mise à l’épreuve, un test de resistance. Ca doit être une bonne part des raisons pour lesquelles j’oriente ainsi ma pensée ces jours ci.
Nous en sommes en fait d’accord : toutes les religions sont pires, mais il n’est pas impossible que l’islam soit encore plus pire.
Ca me semble être un bon résumé.
Ou, dit autrement : tous les dogmatismes sont suspects, c’est pas mal, ça aussi 🙂
Mais je vais y revenir, de manière plus approfondie, je crois, dans un prochain article.
Même si nous sommes d’accord, je vais quand même essayer de préciser ma pensée. Toutes les religions sont haïssables, vectrices de récessions intellectuelle et morale, ennemies du progrès, etc. A ce titre, l’islam n’est pas pire que la religion catholique par exemple.
Cependant, les conditions de vie qui sont faites en France aux populations issues de l’immigration, le souhait radical de non-intégration d’une frange non négligeable des sectataires de l’islam font que certains musulmans constituent des dangers pour nos libertés quotidiennes. Cette menace est encore renforcée p
(suite)… par le fait que ces plus radicaux n’hésitent pas à exercer des pressions inacceptables dans un état laïc (quoique je me demande si elles seraient en fait plus acceptables dans un état confessionnel).
Bon, ça ne justifie pas la lecture de Dantec !