Paraît il que tout le monde se plaint du passage à l’heure d’été, pleurant l’heure de sommeil perdue. POurtant, comme tout le monde est pressé, sauter ainsi une heure est le seul moment de l’année où on peut brusquement accélérer le temps. Pour ma part, chaque semestre, j’ai l’impression de vivre pour de bon ces scènes durant lesquelles, dans Dark City, des êtres supérieurs arrêtent le temps, bloquent les horloges et reconfigurent le monde.
Bref, ce qui importe dans ce changement d’heure, c’est qu’il fait nuit plus tard. Le mois de mars est toujours un temps de frustrations matinales, quand il faut partir au boulot alors que le soleil est déjà levé. Finies les rues obscures, éteintes les fenêtres à travers lesquelles on peut scruter, matin après matin, les habitudes des voisins au petit matin, disparues les lueures de l’éclairage urbain dans la brume. Scratcher une heure sur la platine du temps, c’est recaler l’aube dans la pleine nuit, et retrouver, pour un temps la silhouette du voisin à travers la vitre presque opaque de sa douche, au 3 de ma propre rue, à 6h50 pile poil, le réveil de l’étudiant qui, au 71 de la rue d’â côté, dort volets ouverts et ne songe pas à mettre un caleçon quand il descend de sa mezzanine (ou, au contraire, songe avant même de se lever à ne surtout rien mettre pour rejoindre le sol, se sachant encore assez jeune pour planer au dessus des piétons qui ne peuvent pas trop le louper, s’ils ont compris qu’il se lève à 6h55 très exactement, les caractères luminescents du 14, ou du 3801 qui me cueillera à 7h11 pile poil pour l’un, 7h13 pétantes pour l’autre, si jamais j’ai un peu trop ralenti le pas aux abords du 71. Le temps de rejoindre la gare et la ligne J, l’aube aura lancé ses premiers photons sur la région, aplatissant le paysage et les êtres, révélant les uns aux autres, empêchant désormais de se regarder.
Bon, en gros, voyeurisme quotidien mis à part, Just before dawn, de Sonnymoon, c’est à peu près ça. La voix d’Anna Wise en plus. 8 minutes et des poussières, c’est en gros le temps qu’il faut pour qu’effectivement, le jour se lève. Juste le laps nécessaire pour passer des bras de Morphée à ceux de Morfler. Et il y a un album à attendre sagement, regard tourné vers l’Est, pour fin mai. Trop tard, puisque l’aube tombera désormais beaucoup trop tôt.
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Dans ses deux derniers posts, le jkrsb nous donne une bonne illustration de la différence entre érotisme et pornographie : tout ça c’est du cul, mais quand ça s’adresse à des intellectuels, ça ressortit de la première catégorie.
Je ne suis pas l’auteur de cette définition. Je l’ai lue sous la plume de Jean-Louis Bory dont je ne sais pas s’il en était à l’origine.
Hmmm… je suis pas tout à fait convaincu : je n’exècre pas forcément la pornographie. J’avais l’ambition d’écrire à ce sujet, parce qu’il y a des choses à en dire, mais je n’ai pas jusque là trouvé le ton pour le faire, et d’autres le font bien mieux que moi (je pense au tagparfait, par exemple, ou Lestrade).
Je sais pas si je validerais une quelconque distinction entre pornographie et érotisme. Il y a trop de critères en jeu pour pouvoir faire ce genre de classements.
Mais je suis convaincu, en revanche, que ça ne se réduit jamais au cul. C’est toujours plus que ça. Et alors, au contraire de ce qu’on semble vouloir faire croire, il n’y a vraiment pas de nécessité d’appartenir à une quelconque élite intellectuelles pour saisir cela. Au contraire, il me semble que c’est loin de l’intellectualisation que le cul est le plus pur, et qu’il est donc le moins réduit à lui même.