On l’avait déjà repéré une première fois.
Oh, bien sûr on n’avait pas vraiment supposé que ce fût une pratique isolée, et on pouvait se douter que la petite astuce était fréquemment utilisée. Mais on n’a pas vraiment le courage de se taper chaque JT, ni de France 2, ni de quelqu’autre chaine pour le vérifier.
Toujours est-il que pour les curieux, amateurs d’échelles exotiques (pas du tout, malheureusement, du genre de celles sur lesquelles grimpent les jupes des filles, devant les rétines et pupilles des gars qui aiment ça), les JT de France 2 sont une sorte de parc naturel dans lequel ces spécimens s’ébattent, sous les yeux attentifs du berger gouvernemental.
Il y a un an, c’était Pujadas qui nous présentait des chiffres joyeusement compressés graphiquement pour nous prouver que le gouvernement avait un effet magique sur les chiffres du chômage (un petit retour sur l’image du moment ? c’est ici : http://www.ubris.fr/?p=55). Il faut croire que cette fantastique réussite de notre gouvernement n’a pas du émerveiller les français, car leur moral, un an après, n’est pas au plus haut. Cette fois, c’est Elise Lucet qui, avec le sourire, nous présente la nouvelle à midi (le soir, on considèrera que l’info ne vaut pas la peine d’être présentée de nouveau (en même temps, on est au courant, puisqu’on est les principaux intéressés) : le moral des français baisse. A l’appui de cette info, un graphique, où on voit la courbe du taux de moral des français (comment ça se mesure, le moral, au fait ?) descendre depuis février jusqu’à Mai. Ca a l’air problématique, mais pas gravissime.
Sauf que de nouveau, on a un problème d’échelle : en abscisse, tout va bien, un mois, ça mesure un mois. Par contre, en ordonnée, on passe en univers einsteinien, où tout est relatif : un point d’indice, ça n’est plus un point. Ou plutôt, plus c’est grave, moins c’est grave, puisque la distance graphique séparant le -35 du -40 est plus du double de celle qui sépare le -40 du -46. Jetez juste un coup d’oeil au graphique ci contre, vous allez voir à quel point la courbe serait spectaculaire si on avait appliqué une échelle régulière (et honnête, soit dit en passant, mais bon… si en plus il fallait être honnête dans l’info…)
En d’autres termes, sur France 2, il n’y a que quand l’info les touche directement qu’ils se fâchent. Il semblerait qu’ils n’en fassent jamais assez pour dénoncer les mesures du gouvernement qui les concernent. Par contre, s’il s’agit du moral des autres, ils semblent s’autoriser à demeurer serviles devant un pouvoir qui n’est critiquable que quand il ne s’attaque pas aux autres.
Il paraît que les mesures actuelles mettent en danger le service de télévision publique.
est ce vraiment si grave que ça ?
NB : le JT en question est encore visible aujourd’hui même sur le site de France 2 (c’est l’épisode du jeudi 26 juin, édition de 13h, à 13h07 et 15 secondes, précisément (ça vous évitera de devoir supporter le reste)). A priori, tout le monde les voit, ces JT, je n’ai encore jamais vu personne s’étonner des étranges échelles utilisées dans la transmission des infos qui relèvent de la politique intérieure. Personne ne regarde, vraiment ?
Vous voulez un chouette épilogue ? Dans le même JT, sautez directement à 13h09 et 32 secondes, vous aurez le droit à une belle enquête sur les rapports de Sarkozy avec la télévision. Je ne sais pas jusqu’où sont allés les journalistes pour faire leur reportage, mais une enquête interne aurait été juteuse. En langage courant, ça s’appelle de la conscience professionnelle, ce genre d’enquête.
Lu par hasard ce soir dans « Les mémoires » du Cardinal de Retz :
« Je choisis cette remarque (…) pour vous donner à entendre l’extrémité du mal, qui n’est jamais à son période que quand ceux qui commandent ont perdu la honte, parce que c’est justement le moment dans lequel ceux qui obéissent perdent le respect ; et c’est dans ce même moment où l’on revient de la léthargie, mais par des convulsions. »
Chiche !
Ah ben
Les convulsions
Ca va être l’objet du prochain article justement.
Mais je crains qu’elles ne soient désormais qu’une autre forme d’obéissance, elles aussi.